Dans un petit village abandonné de la «zone grise», coincé entre armée ukrainienne et séparatistes prorusses, vivent deux laissés-pour-compte: Sergueïtch et Pachka. Désormais seuls habitants de ce no man's land, ces ennemis d'enfance sont obligés de coopérer pour ne pas sombrer, et cela malgré des points de vue divergents vis-à-vis du conflit. Aux conditions de vie rudimentaires s'ajoute la monotonie des journées d'hiver, animées, pour Sergueïtch, de rêves visionnaires et de souvenirs. Apiculteur dévoué, il croit au pouvoir bénéfique de ses abeilles qui autrefois attirait des clients venus de loin pour dormir sur ses ruches lors de séances d'«apithérapie». Le printemps venu, Sergueïtch décide de leur chercher un endroit plus calme. Ayant chargé ses six ruches sur la remorque de sa vieille Tchetviorka, le voilà qui part à l'aventure. Mais même au milieu des douces prairies fleuries de l'Ukraine de l'ouest et du silence des montagnes de Crimée, l'oeil de Moscou reste grand ouvert...
Pour tromper sa solitude, Victor Zolotarev a adopté un pingouin au zoo de Kiev en faillite. L'écrivain au chômage tente d'assurer leur subsistance tandis que l'animal déraciné traîne sa dépression entre la baignoire et le frigidaire vide. Alors, quand le rédacteur en chef d'un grand quotidien propose a Victor de travailler pour la rubrique nécrologie, celui-ci saute sur l'occasion. Un boulot tranquille et lucratif. Sauf qu'il s'agit de rédiger des notices sur des personnalités encore en vie. Et qu'un beau jour, ces personnes se mettent à disparaître pour de bon.
Une plongée dans le monde impitoyable et absurde de l'ex-URSS. Un roman culte.
Décembre 1921, le Raj tremble. Un certain Gandhi prône la désobéissance civile et des foules de manifestants pacifiques mais déterminés s'apprêtent à envahir les rues de Calcutta. Comment éviter que l'élégant prince de Galles, en visite officielle, ne soit témoin de la révolte qui gronde? C'est à cette situation inédite que la police impériale est appelée à se mesurer alors que dans la région des meurtres inexplicables se multiplient. Le capitaine Wyndham et le sergent Banerjee n'ont pas peur de se battre sur plusieurs fronts, mais pour Wyndham se rajoute une lutte serrée contre une addiction a l'opium de plus en plus envahissante. Tandis que Banerjee se donne un mal de chien pour concilier l'inconciliable: sa sympathie pour les courants indépendantistes et son appartenance à la police du colonisateur honni. Malgré leur pugnacité, l'issue de tous ces combats est loin d'être acquise.
New York, fin des années 70. La ville est sale, les immeubles délabrés, et il ne fait pas bon s'y promener seul après minuit, mais elle bouillonne de créativité. Les cinémas d'art et d'essai pullulent, les films au casting majoritairement noir connaissent leur âge d'or, et tous les espoirs d'une mixité harmonieuse semblent permis. C'est là que Paul, alias Pablo, fils d'un marchand de boutons juif, rêve de lancer sa carrière de cinéaste. Et que Jay Gladstone, promis à un avenir tout tracé dans l'immobilier, ambitionne de produire son premier long-métrage. Dans le rôle principal, Avery, comédienne afro-américaine qui voudrait devenir une star du grand écran. Un projet aussi ambitieux que fou, porté par l'enthousiasme de la jeunesse, qui pourrait bien rencontrer quelques obstacles...
Un roman drôle et nostalgique qui rend hommage à une ville et à une époque où les illusions n'étaient pas encore perdues.
Kiev, 1919: c'est la cacophonie révolutionnaire. Des armes à foison, de l'ordre nulle part, des bandits et des voleurs cent fois plus nombreux. La ville est tombée aux mains des bolcheviks en février et le nouveau pouvoir s'y met en place tant bien que mal alors que la guerre civile fait rage dans la région, en proie à des combats opposant blancs et rouges, anarchistes et nationalistes... Samson, jeune étudiant, se retrouve du jour au lendemain à devoir se débrouiller seul, après avoir perdu son père et son oreille droite sous le sabre d'un cosaque. Dès lors tout se précipite. Enrôlé presque par hasard dans la milice, Samson va bientôt se lancer dans une enquête où son oreille jouera un rôle quelque peu inattendu...
Les amitiés de l'adolescence sont les plus fortes. On échange expériences, secrets et vêtements, tout en se projetant dans un futur rempli d'espoirs. Elisa et Beatrice, les deux héroïnes de ce roman, n'y font pas exception. Elles ont noué un lien fusionnel bien que leurs histoires familiales diffèrent totalement. La première a grandi avec une mère fantasque et indifférente aux apparences, la seconde a été élevée dans le culte du paraître. Leur relation se trouve bouleversée lorsqu'un changement planétaire, Internet, fait irruption dans leur vie. Elisa continuera à faire partie du «monde d'hier», celui des livres et de la culture, tandis que Beatrice se lancera tête baissée dans l'aventure du «monde nouveau», celui des influenceurs et des réseaux. Et ces courants contraires les entraîneront vers des destins opposés.
1919. La Grande Guerre vient de se terminer en Europe. Après cette parenthèse éprouvante, certains Britanniques espèrent retrouver fortune et grandeur dans les lointains pays de l'Empire, et tout particulièrement en Inde. Ancien de Scotland Yard, le capitaine Wyndham débarque à Calcutta et découvre que la ville possède toutes les qualités requises pour tuer un Britannique: chaleur moite, eau frelatée, insectes pernicieux et surtout, bien plus redoutable, la haine croissante des indigènes envers les colons. Est-ce cette haine qui a conduit à l'assassinat d'un haut fonctionnaire dans une ruelle mal famée, à proximité? d'un bordel? C'est ce que va tenter de découvrir Wyndham, épaulé par un officier indien, le sergent Banerjee. De fumeries d'opium en villas coloniales, du bureau du vice-gouverneur aux wagons d'un train postal, il lui faudra déployer tout son talent de déduction, et avaler quelques couleuvres, avant de réussir à démêler cet imbroglio infernal.
Où sont passées les échoppes des rues de Shanghai où se pressaient les gourmets? La politique sanitaire du gouvernement les a interdites. Que sont devenues les conversations du soir de la cité de la Poussière Rouge? Les caméras omniprésentes et la surveillance sans faille des comités de quartier les ont fait disparaître. Bientôt des bulldozers raseront définitivement la cité et ses vieilles maisons shikumen. Chen, le légendaire inspecteur, ne trouve un réconfort que dans la littérature et la poésie, ultime bastion du passé où il peut encore se réfugier. Pourtant c'est à ses talents d'enquêteur que le Parti fera appel pour résoudre une série de meurtres qui touche le plus grand hôpital de la ville, déjà sous tension. Le mot d'ordre: maintenir à tout prix la stabilité tout en prônant l'efficacité de la politique zéro Covid. Au même moment à Wuhan, les victimes de cette politique se comptent par centaines et les posts des lanceurs d'alerte sont censurés. À quels morts Chen donnera-t-il la priorité?
Paris, 1310, quartier du Marais. Au grand béguinage royal, elles sont des centaines de femmes à vivre, étudier ou travailler comme bon leur semble. Refusant le mariage comme le cloître, les béguines forment une communauté inclassable, mi-religieuse mi-laïque. La vieille Ysabel, qui connaît tous les secrets des plantes et des âmes, veille sur les lieux. Mais l'arrivée d'une jeune inconnue trouble leur quiétude. Mutique, rebelle, Maheut la Rousse fuit des noces imposées et la traque d'un inquiétant franciscain... Alors que le spectre de l'hérésie hante le royaume, qu'on s'acharne contre les Templiers et qu'en place de Grève on brûle l'une des leurs pour un manuscrit interdit, les béguines de Paris vont devoir se battre. Pour protéger Maheut mais aussi leur indépendance et leur liberté.
Aline Kiner nous entraîne dans un Moyen ge méconnu. Ses héroïnes, solidaires, subversives et féministes avant l'heure, sont résolument actuelles.
Venu se désintoxiquer de son addiction à l'opium dans un ashram au coeur de l'Assam, le capitaine Wyndham ne pensait pas, entre deux tisanes infâmes, prendre précisément des vacances. Cependant il ne pouvait imaginer qu'en ce mois de février 1922, à l'autre bout de la planète, un fantôme surgi d'un lointain passé londonien reviendrait le hanter. Un de ces sales types croisés du temps où, jeune policier à Scotland Yard, il faisait ses premières armes dans les quartiers populaires de l'est de Londres, là où dockers anglais, immigrés et trafiquants de tout poil ne faisaient pas bon ménage. Mais que peut bien faire cet escroc dans ce coin paumé où on ne trouve pas un whisky convenable à des miles à la ronde?
Deux enquêtes croisées pour dénoncer une même peur de l'étranger à travers une énigme digne des maîtres du genre.
Si nous étions en Iran, cette salle d'attente d'hôpital ressemblerait à un caravansérail, songe Kimiâ. Un joyeux foutoir où s'enchaîneraient bavardages, confidences et anecdotes en cascade. Née à Téhéran, exilée à Paris depuis ses dix ans, elle a toujours essaye de tenir à distance son pays, sa culture, sa famille. Mais les djinns échappés du passé la rattrapent pour faire défiler l'étourdissant diaporama de l'histoire des Sadr sur trois générations: les tribulations des ancêtres, une décennie de révolution politique, les chemins de traverse de l'adolescence, l'ivresse du rock, le sourire voyou d'une bassiste blonde
Une fresque flamboyante sur la mémoire et l'identité; un grand roman sur l'Iran d'hier et la France d'aujourd'hui.
Par appréhension ou par habitude, peut-être par confort, elle n'a jamais quitté la petite ville où elle est née. Pourtant, le quotidien de Tiffanie ne tient qu'à un fil. Deux enfants à charge, un ex-mari en prison, la fatigue qui s'accumule dans son corps d'aide-soignante. Et la violence, sourde, latente, qui explose parfois quand Chris, son fils de quinze ans, perd le contrôle ou quand les copains ont un peu trop bu. Il suffit d'une rencontre avec un nouveau venu le soir du 14 Juillet pour inverser la tendance. En Marvin, Tiffanie trouve un compagnon capable de l'épauler et de gérer ses fils. Un compagnon parfait, sauf aux yeux du cadet, Joris, qui n'arrive pas à lui faire confiance. Mais qui croirait un enfant de sept ans?
Premier roman incisif et vibrant, Tout part à la nuit raconte le déchirement d'une famille prise dans un jeu qui la dépasse.
Échouer à prévenir l'assassinat d'un prince n'est pas un fait d'armes dont peuvent s'enorgueillir le capitaine Wyndham et le sergent Banerjee, de la police de Calcutta. Piqués au vif par cet échec, l'inspecteur et son adjoint décident de suivre la piste des mystérieuses missives reçues par le prince jusqu'à Sambalpur, petit royaume de l'Orissa, célèbre pour ses mines de diamants. Le vieux maharajah, entouré de ses femmes, et de dizaines de concubines et enfants, paraît très affecté par la mort de son fils aîné, et prêt à accepter leur aide. D'omelettes trop pimentées pour les papilles anglaises au culte de l'étrange dieu Jagannath, en passant par une chasse au tigre à dos d'éléphant, Wyndham et Banerjee seront initiés aux moeurs locales. Mais il leur sera plus compliqué de pénétrer au coeur du zenana, le harem du maharajah, où un certain confinement n'empêche pas toutes sortes de rumeurs de circuler. Au-delà du suspense, une plongée au coeur des petits royaumes de l'Inde traditionnelle des années 1920, et une subtile analyse de l'impossible coexistence entre Britanniques et Indiens.
Le lac Caddo, une immense étendue d'eau verdâtre aux confins du Texas et de la Louisiane, où les silhouettes décharnées des cyprès se perdent dans la brume. Quand le soir tombe, mieux vaut ne pas y naviguer seul, sous peine de ne plus retrouver son chemin dans les innombrables bayous et de «passer une nuit au motel Caddo», comme disent les anciens. C'est d'ailleurs parce qu'un enfant a disparu sur ce lac que Darren Mathews, Ranger noir du Texas, débarque à Hopetown, un lieu reculé habité par une communauté disparate. Quand il découvre que des Blancs pauvres et racistes dans des caravanes de fortune partagent cette terre avec quelques Indiens Caddos et un vieux Noir descendant d'un groupe d'esclaves affranchis, il comprend que l'affaire ne sera pas banale. D'autant que le père de l'enfant disparu, un suprémaciste dont la mère est la plus grande fortune du comté, purge une peine de prison pour un meurtre raciste... Un roman fort qui nous plonge dans l'Amérique de Trump et le Sud profond, où des laissés-pour-compte sont prêts à toutes les violences pour survivre.
Il pleuvait à torrents et personne, vraiment personne, n'était prêt à ouvrir sa porte, et surtout pas à ces individus. Oui, il y avait des Blancs parmi eux - les humanitaires qui les accompagnaient - mais ils étaient tout aussi étranges que les autres malheureux, mal fagotés et mal en point. Que venaient-ils faire, ces envahisseurs, dans notre petit village où il n'y avait plus de maire, plus d'école, où les trains ne passaient plus et où même nos enfants ne voulaient plus venir? Nous nous demandions comment les affronter, où les abriter puisqu'il le fallait. Eux aussi, les migrants, avaient l'air déboussolés. C'était pour ce coin perdu de Sardaigne, ce petit village délaissé, qu'ils avaient traversé au péril de leur vie la Méditerranée? C'était ça, l'Europe?
Pour que Jim, chauffeur Uber de soixante ans, voie la vie du bon côté, que faudrait-il? Une petite cure d'antidépresseurs? Non, c'est plus grave, docteur. De l'argent? Jim en a suffisamment. Au fond, ce qu'il veut, c'est qu'on lui fiche la paix dans ce monde déglingué. Et avoir affaire le moins possible à son prochain, voire pas du tout. Alors, quand sa nouvelle voisine, flanquée d'un mari militaire et d'un fils de quatre ans, lui adresse la parole, un grain de sable se glisse dans les rouages bien huilés de sa vie solitaire et monotone. De quoi faire exploser son quota de relations sociales...
En entremêlant les destins de ses personnages dans un roman plein de surprises, Levison donne le meilleur de lui-même, et nous livre sa vision du monde, drôle et désabusée.
Un empire financier bâti sur deux générations suffit-il à mettre les descendants à l'abri des tracas de la vie? Apparemment non car Jay Gladstone, l'héritier flamboyant de cette fortune, est assailli par les mêmes tracas que le commun des mortels: épouse exigeante, progéniture insupportable, obligations familiales, contraintes sociales. Également propriétaire d'une équipe de basket, Jay doit aussi compter avec les coûteux caprices des joueurs, noirs pour la plupart, dont la super star Dag. Nous sommes en 2012 et Obama fait campagne pour un second mandat, mais cela n'apaise pas pour autant les conflits raciaux. Il suffit qu'un Blanc tue un Noir, accidentellement ou délibérément, et le pays s'embrase. La machine médiatique se met alors en route, le politiquement correct emplit les colonnes des journaux, les procureurs en mal de notoriété se retroussent les manches, les fake news envahissent les réseaux sociaux. La mécanique de la chute est désormais enclenchée.
Un grand roman sur les embûches de notre temps et ses dangereuses dérives.
En quête de l'amour idéal, l'héroïne tarde à trouver un mari. À trente ans, déjà considérée comme une vieille fille dans une Sardaigne qui connaît les affres de la Seconde Guerre mondiale, elle finit par épouser un homme taciturne, plus âgé qu'elle, parce que sa famille le lui impose. L'amour n'est pas au rendez-vous. Elle le rencontrera beaucoup plus tard, lorsqu'elle ira sur le Continent faire une cure thermale pour soigner son «mal de pierres», des calculs rénaux. Un rescapé de la guerre, qui souffre du même mal qu'elle, aura raison de son «mal d'amour». C'est à sa petite-fille qu'elle racontera quelques décennies plus tard ses émotions, ses cheminements, tout en laissant des zones d'ombre. Mais quelle est au juste la vérité ? Elle ne se recomposera que beaucoup plus tard, de façon inattendue, lorsque la dernière pièce du puzzle tombera entre les mains de la narratrice.
Le légendaire et dérangeant inspecteur Chen est sur la touche. Le Bureau de la réforme du système judiciaire, une voie de garage destinée à l'éloigner des enquêtes trop indiscrètes, pourrait le satisfaire en lui laissant le temps d'écrire un roman inspiré par le célèbre juge Ti. Mais on ne se refait pas, et la tentation d'aller fourrer son nez dans une affaire qui bruisse dans Shanghai-celle mettant en cause une belle courtisane qui ouvre sa table privée aux éminences et aux Gros-Sous de la ville-est plus forte que la sagesse. Tout en s'abritant derrière sa très efficace secrétaire, la jolie Jin, l'inspecteur finit par découvrir que le commerce des antiquités chinoises peut s'avérer extrêmement rentable mais parfois dangereux. Et qu'il vaut mieux ne pas se mettre à dos la Sécurité intérieure et les puissants princes rouges...
On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. Eddy le sait. Pourtant il décide, trente ans après une première descente du Mississippi en canoë, de réitérer l'exploit. Mais cette fois ce n'est pas l'exploit qui l'intéresse. Il n'a rien a se prouver. Il veut juste prendre la mesure du temps écoulé. Eddy a changé, le fleuve a changé, le pays a changé. Quelque chose flotte dans l'air, prémices d'un changement radical. Descendre le cours mythique du Mississippi, c'est traverser les lieux emblématiques d'un passé plus violent que glorieux, et le regarder en face. S'interroger sur les peuples qui vivaient sur ces terres avant l'arrivée des Européens. Évoquer, au gré des rencontres, les actions humaines, bonnes ou mauvaises, sur le milieu naturel. Mais aussi se laisser porter par le hasard, les flots tantôt calmes, tantôt impétueux, et par le fil de pensées vagabondes.
L'arène, c'est ce quartier de Paris où se mesurent les gladiateurs d'aujourd'hui: adolescents de la Cité Rouge, migrants égarés sur l'asphalte, jeunes bobos assoiffés d'images et de popularité. Au centre, Benjamin Grossmann, le directeur des séries d'une célèbre plateforme: il ne faisait que passer par là, de nuit, il se met a courir après un jeune à capuche, persuadé qu'il vient de lui dérober son portable. Au petit matin, en patrouille au bord du canal Saint-Martin, Sam, la policière bien notée, pousse du pied le corps sans vie de l'adolescent qu'elle prend pour un sans-logis. Quant à Camille, la lycéenne toujours prête à filmer les dérapages de la police, elle enregistre ce qu'elle voit Sa vidéo va enclencher une spirale vertigineuse en tournant en boucle sur les réseaux. Tout le quartier entre en ébullition. Ses acteurs du quotidien sont aspirés dans ce roman palpitant.
Alléger le vernis, dégager les repeints, combler les lacunes requiert de longues heures de concentration et de patience qui permettent à un tableau ancien de renaître. Peut-on faire de même avec le passé? Le jour où Marion décide de poser ses outils de restauratrice pour se rendre là où s'est nouée sa douloureuse histoire familiale, elle pense ainsi parvenir à se débarrasser des repeints dont sa mère a recouvert le drame qui les a frappées et l'image de son frère Léo, disparu sur l'île de Batz vingt ans auparavant. Mais dans ce lieu rude et envoûtant, où les algues brunes prolifèrent et le quotidien est rythmé par les marées, les langues se délient rarement et les secrets finissent emportés par les courants de la Manche.
Sur le quai de la gare de Perrache, un jour de l'année 1929, une jeune Hongroise, Szonja, a rendez-vous avec son avenir. Pour quitter le dur labeur de paysanne, elle n'a pas hésité à gagner la France et l'usine qui l'a embauchée à la production de viscose, cette soie artificielle bon marché. À Vaulx-en-Velin, dans la cité industrielle, elle accepte la chambre d'internat chez les soeurs, les repas au réfectoire et les dix heures quotidiennes à l'atelier saturé de vapeurs chimiques. Les ouvriers italiens ne font-ils pas de même? Elsa, Bianca, Marco et les autres tiennent les rythmes épuisants, encaissent les brimades des chefs, inhalent les fumées nocives contre de maigres salaires. Cela ne les empêche nullement de danser le dimanche au bord de la Rize.
Dans ces modestes vies d'immigrés, la grande crise fera irruption, amenant chômage, mise a l'écart des étrangers et affrontements avec les ligues. Portée par une inébranlable solidarité et une détermination à vivre, la colère constituera le socle de leur rassemblement, jusqu'à aboutir au Front populaire.
Il y a la Méditerranée, la lumière, l'île d'Elbe au loin. Mais ce n'est pas un lieu de vacances. C'est une terre sur laquelle ont poussé brutalement les usines et les barres de béton. Depuis les balcons, on a vue sur la mer, sur la plage, une scène idéale pour la jeunesse de Piombino. Entre drague et petites combines, les garçons se rêvent en chefs de bandes, les filles en starlettes de la télévision. De quoi oublier les conditions de travail à l'aciérie, les mères accablées, les pères démissionnaires... Anna et Francesca, bientôt quatorze ans, sont les souveraines de ce royaume cabossé. Ensemble, elles jouent de leur éclatante beauté, rêvent d'évasion et parient sur une amitié inconditionnelle pour s'emparer de l'avenir.