Une critique de Suzanne Jacob paru dans le No 300 de la revue Liberté.
C'est avec grand plaisir que nous accueillons dans nos pages l'auteure Suzanne Jacob. Dans ce premier texte pour Liberté, elle se demande quel est le véritable enjeu du dernier film de Bernard Émond. Cette histoire d'héritage est peut-être plus inquiétante qu'on ne le croit.
Dans Passages américains, paru en 2012 peu après le printemps étudiant, Marie-Claire Blais pose un regard rétrospectif sur la lutte pour les droits civiques des années 1960 aux États-Unis et livre un dense plaidoyer pour l'action collective, la résistance politique, mais surtout pour la puissance d'action de la jeunesse. Deux choses frappent dans ce court texte qui constitue en quelque sorte le point de départ de ce dossier. D'une part, il devient évident, à la lecture de ce livre, que la formation politique de Blais est américaine et se distingue nettement en cela de celle des écrivains québécois qui sont ses contemporains. Cette genèse, qu'on trouve aussi dans Parcours d'un écrivain. Notes américaines, paru pour sa part en 1993, éclaire autrement l'ensemble de cette oeuvre où l'Amérique s'écrit en français ; c'est là sûrement l'une de ses singularités. D'autre part, l'oecuménisme politique qui semble teinter les romans du cycle Soifs tranche avec la radicalité des actes de désobéissance civile dont l'auteure fait l'éloge et dont elle salue la mémoire dans Passages américains. Comprendre politiquement l'oeuvre de Marie-Claire Blais, sans la réduire à des idées ou à des mots d'ordre, exige d'explorer ces paradoxes. Il y avait plusieurs années qu'un écrivain n'avait pas fait l'objet d'un dossier de la revue. En cette époque où la littérature est plus que jamais soumise aux écrasantes lois du marché et doit trop souvent se plier aux dictats de l'industrie culturelle, le parcours de Marie-Claire Blais - plus encore, son ambition - est à la fois un puissant antidote contre le cynisme et un exercice de lucidité. Inlassablement, elle invite à regarder le monde dans toute sa violence pour parvenir à en dégager des parcelles d'espoir et d'humanité.
Il semble que nous aimons bien, au Québec, ne pas aimer notre système de santé. On a beau connaître par coeur la litanie des clichés à son sujet, on dirait qu'on ne s'en lasse pas.
Il va sans dire, orchestrer les soins pour toute une population n'est pas une mince affaire. Nous avons donc souhaité, pour ce numéro d'automne de Liberté, revenir au fondement même de toute organisation de santé, soit le souci du blessé, du malade, du démuni, en mettant en lumière ceux et celles qui s'y consacrent.
L'alcool, comme le vent, semble ne pas connaître les frontières de classes sociales, de sexe, ou d'orientations politiques. Malin, il sait trouver sa niche presque partout.
Nous avons souhaité, pour ce numéro d'été, explorer quelques facettes de ce liquide ambigu, histoire de voir ce qu'il sait nous révéler du monde et de la manière dont les hommes et les femmes qui l'habitent organisent leur territoire, leur économie, mettent en place leurs petits et grands rituels.
Au problème complexe des finances de l'État, il y aurait, nous dit-on, une réponse simple : couper, démanteler, réduire, détruire, restreindre. Devant la diminution de sa marge de manoeuvre politique, la réponse de notre gouvernement se résume ainsi à diminuer davantage cette marge de manoeuvre. Drôle de réflexe. Nous avons souhaité réfléchir à ce paradoxe dans le nouveau numéro de Liberté : au-delà de sa dimension économique, quelles sont les implications sociologiques, psychologiques et esthétiques de l'austérité ?
Au problème complexe des finances de l'État, il y aurait, nous dit-on, une réponse simple : couper, démanteler, réduire, détruire, restreindre. Devant la diminution de sa marge de manoeuvre politique, la réponse de notre gouvernement se résume ainsi à diminuer davantage cette marge de manoeuvre. Drôle de réflexe. Nous avons souhaité réfléchir à ce paradoxe dans le nouveau numéro de Liberté : au-delà de sa dimension économique, quelles sont les implications sociologiques, psychologiques et esthétiques de l'austérité ?
Vous trouverez dans cet extrait tous les articles du rétroviseurs sur Anne Hébert, paru dans le No 301 de la revue Liberté.
Pourquoi inaugurer le « Rétroviseur » avec Anne Hébert ? D'une part, il nous semblait qu'elle jouit d'un tel prestige institutionnel qu'il devient un peu difficile de la lire hors des ornières scolaires. De plus, contrairement à d'autres « grands auteurs » québécois, il nous apparaît plus difficile d'identifier avec précision la postérité de son oeuvre chez les plus jeunes. Il nous semblait aussi, peut-être à tort, que la violence et la puissance de son travail étaient souvent escamotées au profit d'un vernis de terroir ou d'un romantisme de pacotille. Nous avons demandé à quatre écrivains - et pas les moindres ! - de casser la glace. Ils ont largement dépassé nos attentes et ont signé des textes singuliers et engagés qui redonnent un lustre à l'oeuvre d'Hébert. Pour tout dire, ça donne follement envie de replonger dans ces beaux livres obscurs.
Comment en sommes-nous venus à célébrer le progrès tout en craignant la fin du monde? Nous n'en finissons plus de nous extasier devant nos avancées technologiques, devant l'expansion de notre ouverture d'esprit et, d'un même mouvement, nous ne cessons de faire le décompte des catastrophes écologiques, économiques et humanitaires qui nous accablent. Le présent dossier explore ces questions.
Le présent dossier explore une emprise, non pas celle d'un penchant politique mais bien d'un ordre économique, sur nos vies et avant tout sur nos façons de sentir, de ressentir, d'éprouver et, bien entendu, d'être ensemble. Car avant de penser le monde, nous l'éprouvons. Et si notre rapport au monde, aux autres, à nous-mêmes, aux idées, alouette, relève d'abord du sensible, qu'est donc devenue notre sensibilité pour que nous acceptions nos existences stériles, anémiques, vides de sens surtout et dans lesquelles, collectivement, nous ne nous emballons plus qu'à l'annonce de projets d'intendance, de profits à court terme ou de victoire des Canadiens ? N'y a-t-il plus rien d'autre en ce monde et en nous-mêmes qui soit en mesure de nous paraître tangible ? La moindre marge du système semble avoir disparu. C'est peut-être pourquoi les temps présents sont devenus invivables. « C'est la marge qui tient la page », disait Jean-Luc Godard. Sans elle, tout fout le camp. Et c'est peut-être justement l'absence d'un tel espace, mental comme politique, qui caractérise la violence particulière que notre époque déploie. Les champs en friche, pour le dire ainsi, donnent l'impression d'avoir été éliminés. Peu importe la direction vers laquelle nous tournons la tête, l'espace est cadastré par la raison du plus fort. Comment, dès lors, d'autres choses, d'autres formes, d'autres images, d'autres pratiques pourraient-elles émerger ? À partir d'où pourraient-elles se déployer et nous permettre de fissurer l'homogénéité de tout ce qui se propose à nous ?
Tout comme la religion catholique s'immisçait, au Canada français, dans les moindres recoins du département de l'instruction publique, les paramètres de la gestion, de l'entreprenariat, de la rentabilité et même de la production semblent aujourd'hui imprégner de bout en bout notre ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport.
Ce dossier se veut d'abord une occasion de réfléchir aux raisons historiques qui expliquent l'état actuel de notre enseignement ainsi qu'aux influences - souvent internationales - qui l'affectent. Nous voulons aussi signifier aux femmes et aux hommes oeuvrant dans les tranchées de notre système scolaire qu'ils ne sont pas seuls.
Omniprésent, l'humour se donne à toutes les sauces. Drapés dans la vertu, certains humoristes invoquent la liberté d'expression ou la tolérance pour tenir des propos parfois douteux. Plusieurs affirment haut et fort que l'humour est l'antidote aux dérives autoritaires et aux mensonges du pouvoir. D'autres encore riront de leur propre impuissance à changer quoi que ce soit aux mécanismes qui régissent la vie en société. Mais qu'en est-il réellement? Que peut l'humour lorsque la pensée néolibérale se glisse imperceptiblement dans le vocabulaire du citoyen, modifiant de ce fait son rapport au monde?